Qu'ils Meurent...

©AFP
Imaginez-vous ravagé(e) par le meurtre de votre époux(se), désespéré,(e), cerné(e) par de petits énergumènes, miniatures de votre morphologie anémiée, tenant à peine debout, comme Vous le faites difficilement, le ventre aussi creux que les joues.

Imaginez-vous ancien cultivateur (trice) claudiquant et fouillant des yeux la moindre saillie verte dans ce désert de souffrance : les vulgaires arbustes qui vont bientôt manquer et que vous vous harassiez pourtant à désherber dans votre passé aujourd'hui lointain de laboureur radieux. 













Imaginez le fruit de vos entrailles mourir dans vos bras, les lèvres gercées comme le sein maternel, dépérir et rendre, avec moins de peine que toute  celles endurées dans  sa courte vie, son dernier soupir, las d’attendre une sève nourricière tarie d’une mamelle desséchée.
Imaginez-vous un seul instant, passant une seule journée dans un enfer qui ne dit pas son nom 
Soldat malgré vous, bravant la peur au jour le jour, résistant contre l’envie de prendre les armes, brandir ces machettes dégoulinantes de sang comme  ceux  qui ont éventré votre femme enceinte, violé vos sœurs, asservi sexuellement vos filles, combattant pour préserver votre humanité sous des cieux autant « cléments » que les rayons de soleil dardant la peau sur vos os rebutant le moins repu des vautours qui planent au-dessus de votre tête.
Imaginez-vous échapper à toutes sortes d’horreurs pour finalement mener le reste de votre « troupe familiale » dans votre (dernière)  bataille contre la FAIM. 
Imaginez-vous Sud-Soudanais !
©JeuneAfrique
Ce petit récit qui ne résume malheureusement pas exhaustivement leur sort est pourtant leur calvaire. 
4,9 millions d’entre eux souffrent de faim. 40% ont besoin d’une aide le plus rapidement possible en matière de nourriture, dépassant largement le seuil de 15% d’urgence d’intervention pour personnes souffrant de malnutrition. Quoi de plus pressant que 30% de la population qui souffre de malnutrition extrême et dont 1 sur 5000 d’entre eux meurt chaque jour. Statistiques macabres à revoir à la hausse très bientôt si rien n’est fait.
Le résultat d’une longue et sanglante guerre civile qui a débuté en fin 2013 dans cet Etat-poucet d’à peine 7 années d’existence.
Des querelles politiques sur fond de tensions ethniques qui aujourd’hui, depuis longtemps, mais encore plus qu’auparavant, obligent les organismes d’aide humanitaire et des droits de l’homme à tirer sur la sonnette d’alarme dans la cacophonie d’un Monde globalisé où la vie d’un Etre humain de surcroit de peau noire a perdu de sa valeur.

L’indifférence à une telle situation est générale et encore plus frappante à l’orée du silence accusé par les Etats africains et les Africains eux-mêmes  vis-à-vis d’une telle crise sécuritaire et par ricochet alimentaire.
Aucune once de réaction, aucun cri d’alerte encore moins de solidarité de la part des futurs concitoyens théoriques de l’hypothétique Union Africaine de 2063. Et pourtant ça se passe à "quelques mètres" d'Addis Abbeba, le symbole de "l'Unité". 
Sans doute attend-on que des (d’autres) centaines de milliers de personnes meurent « là-bas » pour qu’on s’en émeuve. 
Déjà a-t-il fallu plus d’une année après les exactions, rivalisant de cruauté de part et d’autre, des belligérants pour que l’Union Africaine daigne exhiber son rapport les incriminant timidement. Dans le vide et sans effet ! Les gamins émasculés et laissés à leur sort avaient fini de se vider de leur sang, les pauvres torturés dans des containers sous le soleil de plomb avaient eux, fini d’étouffer tandis que les villageois pris au piège dans leur case étaient réduit à des tas de cendres, tétanisés entre le choix cornélien de finir leur vie avec un morceau de chair de leurs proches dans la bouche, ou de voir leurs mômes rejoindre les milliers d’autres enfants-soldats. 
Mais peut-être que les traditionnels bouc-émissaires Blancs, cause de tous nos malheurs de Noirs, commanditaires de tous les Seigneurs de guerre n’ont qu’à s’en occuper à l’image des médias africains n’effleurant le sujet qu’entre deux ou trois flash internationaux. Relayant comme meubles de leurs éditions d’informations, des dépêches d’agences de presse étrangère, d’ailleurs reprises le plus souvent littéralement et sans tilter sur la gravité de la situation relatée.
Anecdote la plus risible ou dramatique, c'est selon, un Youtubeur français a réussi quant à lui à mobiliser avec ses followers (au moins utiles…) 2 millions d’euros de vivres à destination des « damnés » de l’autre Etat-Fantôme: les Somaliens (affectés au même titre que les 9,2 millions de réfugiés ayant fui les violences de Boko Haram.. ) , le temps que leurs « Frères Noirs » se réveillent de leur inertie face à des périls qualifié pertinemment par un Tiers de « presqu’entièrement causées par l’Homme ».