Au fur et à mesure que s’est forgé l’orgueil incommensurable du brave Lion, s'est également développée, vraisemblablement, une allergie à la critique
Une fierté très souvent mal placée d’autant plus qu'elle ne se dévoile au grand jour que lorsqu’on touche à partie moins reluisante que la crinière lissée continuellement par son propriétaire.
Pur patriotisme ? Ma foi non. Mauvaise foi? Relativement.
Pâle situation économique, problèmes judiciaires, traite des enfants Talibés, grèves cycliques, mauvais choix d’investissement, corruption… sont, entre autres sujets, le menu quotidien de nos indispensables protestataires oisifs-errants.
Sauf qu’à chaque fois, leur cause n’a d’écho que lorsqu’une voix extérieure porte haut, sans le savoir, le combat.
Depuis 2012, il est pointé du doigt la boulimie ministérielle du régime en place malgré ses promesses de campagne de son leader, depuis l'aube des temps on jase sur la propension des politiques à consacrer toute leur énergie à des considérations puériles au détriment des choses sérieuses sauf que cela n’émeut personne.
Mais a-t-il fallu qu’un Erdogan fatigué par une série de poignées de mains protocolaires ou qu’un Ministre venu de la Gambie fasse une remarque peu ou prou mal placée mais tout de même vraie pour que le haro s’abatte sur lui.
La rhétorique peut toujours être résumée à la même devise : « On ne nous donne pas de leçon... » même si on aime clamer haut et fort, à chaque visite d’une délégation étrangère, que telle ou telle autre autorité de tel ou tel autre sous-pays (au moins modeste) est venue bénéficier de l’expérience et de l’expertise sénégalaise.
Autre situation cocasse : au moment même ou le Ministre de la Justice s’insurgeait contre le rapport accablant d’Amnesty International, ces simples « promoteurs de l’homosexualité » comme fera sous-entendre malicieusement un peu plus tard le Premier Ministre alors qu’une infime partie était consacrée à ce sujet, le porte-parole du Gouvernement se félicitait urbi et orbi des progrès ainsi que de l'optique du Sénégal de figurer en bonne place dans le Classement « Doing Business ». Le même classement auquel un de ses hauts responsables durant plusieurs années a prêté de grandes failles à visée manipulatrice il n'y a pas très longtemps.
Juste avant cela d’ailleurs, les Médias, notamment d'Etat, ont largement relayé les résultats d'une mission d’audit, étrangère il faut le préciser, qui délivrait un quitus sur le fichier électoral aux autorités chargées d’organiser les élections.
« Quand ça ne remet pas en cause là, c’est que c’est favorable »
On ne se saisit d'une question que lorsque c’est un doigt étranger qui ose pointer une des nombreuses plaies sur lesquelles bourdonnent, depuis fort longtemps, les mouches locales.
À la place de l'ignorance réservée de coutume aux nationaux, on se précipite vers les ondes internationales pour répondre d’une attaque ou rectifier un tir blessant contre « l’image » ou la « réputation » du Sénégal.
Cette hyper-disponibilité des autorités gouvernantes contraste d'ailleurs curieusement avec le sort réservé aux journalistes des médias du pays.
Très souvent malheureusement, la population elle aussi se prête au jeu ou tombe plutôt dans le piège.
Encore pire quand le « pourfendeur » est issu de la sous-région.
Tous les propos, statistiques et faits historiques dévalorisants et hors-contexte ne suffisent pas pour lui rappeler sa juste valeur : c’est de bonne guerre !
Ça aurait été mieux si la base de l’argumentaire était le non fondé de celui de l’autre sauf que sous le coup de la colère et de la précipitation tous les moyens sont bons pour rétorquer, quitte à en inventer.
Qui disait encore que le Sénégal est le nombril du Monde…
Ah j’oubliais, en fait, l’alter-criticophobie, vous l’aurez compris, c’est la Peur insensée de la critique de l’autre (non-sénégalais).